Le désert de l'agonie II

La nuit était fraiche. Trop fraiche. Nous n’étions pas assez chaudement habillés. Nous regrettions le soleil. Enfin je préfère avoir trop froid que trop chaud.
Nous arrivâmes plus rapidement que prévu au point de rendez-vous. L’autre groupe n’était pas encore là. Le désert était calme, et l’obscurité le rendait encore plus inquiétant. Mon imagination carburait à vive allure de ce qui pouvait sortir des ténèbres. Je m’efforçai de penser à autre chose. Pour me rassurer, j’étendis mes sens au-delà de la zone d’ombre. Il n’y avait rien. Mais je n’étais pas rassuré pour autant.
- Essayez de dormir, dit Holda. Je vais monter la garde. Au cas où.
Cette phrase nous inquiéta plus qu’autre chose et je ne pus fermer l’œil de la nuit. Comme tous les autres.

Le soleil se leva et réchauffa l’atmosphère. Pour le moment il était le bien venu mais bientôt il serait maudit. Déjà, la chaleur faisait onduler l’horizon.
- Nous ne pouvons pas rester ici, dit Zû.
- Je suis d’accord, approuva Holda. Asgaroth, peux-tu retrouver l’oasis d’hier ?
- Je l’ai déjà repérer, répondis-je. Elle est l’est, à environ deux heures de marches en ligne droite.
- En route ! s’exclama Rükhaas.
La chaleur le faisait déjà transpirer. Nous nous mîmes en route. Avant de partir, je déposai du vif-argent à l’endroit exact où j’avais tracé mon pentacle, suivant le contour à la perfection. J’ajoutai un mince filet et je le soudai à mon corps par une incantation. De cette façon, le pentacle me suivrait et les autres pourraient nous retrouver. Nous allions les attendre à l’oasis. Le vif-argent est un produit fantastique.

Nous étions à environ mi-chemin et la chaleur était infernale. Il faisait encore plus chaud qu’hier alors que le soleil était plus bas.
- Ce n’est pas normal, dit Zû.
L’air ondulait juste devant nous, créant des mirages. Je ne comptais plus le nombre de fois où nous avions cru être arrivé. Mais l’oasis était encore loin. Il n’y avait rien devant nous, enfin je ne sentais rien.
Soudain, une colonne de feu s’éleva droit devant. Elle était très proche.
- Un incendie ? cria Obsédianne.
- Non, répondit Holda. C’est pire.
En effet, il s’agissait d’une salamandre adulte. Et elle nous avait repéré. J’invoquai Penbama et Obsédianne son boomerang. Zû fit apparaitre une arbalètes et des carreaux de mana. Holda revêtit une armure qui absorbait les éléments, d’après notre enquête. Rükhaas enfila ses mitaines. Nous étions prêts à nous défendre.
Le monstre avait une peu recouverte d’écaille rouge vif. Il était trois fois plus haut que Holda et devait peser dans les cinq cents kilos. Il avait un long cou, épais, les longues écailles ventrales, orange, remontaient jusqu’à la base de sa tête. De sa bouche dardait une langue fourchues entre ses crocs acérés. Une goutte de salive tomba sur le sable qui se sublima. Nous n’avons aucune chance, pensai-je. Et nous ne pouvons même pas nous enfuir, elle nous traquerait à travers tout le désert. Néanmoins, j’était décidé à me battre, comme tout le monde.
Le monstre cracha un jet de flammes que Rükhaas détourna grâce à ses mitaines. Obsédianne lança son boomerang mais la salamandre esquiva. Zû libéra un carreau qui rebondit sur ses écailles. Je fis apparaitre un pentacle pour l’immobiliser mais elle se dégagea sans difficultés. Un nouveau jet de flammes atteignit cette fois-ci Holda. Son armure absorba le choc. Deux globes de mana jaillirent des mains de la démone. Elle les lança et toucha la salamandre, qui recula. Ce fût ce moment que choisis Rükhaas pour sauter sur son cou et lui planter ses griffes dans le corps. La bête hurla et s’agita violemment. Le démon fut projeté, il ne se releva pas. Du sang coulait de la blessure de la salamandre.
- Que quelqu’un aille voir s’il va bien ! tonna Holda.
Ce fut Obsédianne qui obéit. Elle posa sa main sur lui et leva un pouce. Rükhaas était juste assommé. Je ne pouvais pas blesser une salamandre avec mon mana, mais je pouvais renforcer les carreaux de Zû. Je fis apparaitre un pentacle sous ses pieds et je l’activai. Il ne le vit pas mais son carreau transperça la base du cou de la salamandre. Malheureusement, ce n’était pas une blessure mortel. Elle courut vers Zû et l’envoyer valser d’un formidable coup de queue. J’atténuai l’impact comme je pus quand Holda cria quelque chose. Je vis la tête de la salamandre fondre sur moi. Je me dématérialisai aux côtés d’Holda. Le sort avait fonctionné, je n’en revenais pas. Un nouveau jet de flammes balaya le désert. Elle voulait nous faire cuire. À l’aide d’un pentacle et de l’incantation appropriée, j’attirai le tout sur Holda. Elle fut surprise et encaissa le choc. Son armure était maintenant rouge.
- Ça brûle ! hurla-t-elle.
Elle se roula sur le sable. J’avais vu comment fonctionnait son armure. J’absorbai une partie de mana, elle en était saturée. Je me concentrai que sur ça quand je fis le boomerang d’Obsédianne passer devant mes yeux. Il frappa la gueule de la salamandre qui se détourna. Je vis alors Rükhaas, les yeux rouges et deux bras puissants terminés par des griffes. Il était à moitié transformé. Il sauta sur le dos de la bête et planta ses griffes à la base de son cou. Elle hurla encore plus fort. Avec sa queue, elle saisit le gêneur et l’envoya promener. Une boule de mana beaucoup plus puissante que tout à l’heure frappa le monstre en pleine tête. Holda se tenait debout, haletante. Son armure avait retrouvé sa couleur normale.
Légèrement secouée, la salamandre se rua sur la démone. Je fis ce que je pus pour la ralentir sans y parvenir. Holda se retrouva piétinée. Elle ne bougeait plus. La tête du monstre se baissa pour la manger. Je réussis à faire disparaitre son repas. Malheureusement pour moi, le corps d’Holda était apparu à mes côtés. Il ne restait que moi et Obsédianne pour lutter. Nous n’étions pas de tailles.
Une autre boule de mana frappa la salamandre en pleine tête. Puis une obscurité venue de nulle part envahit le désert. Sopale sortit des ombres en courant, elle tenait une hache dont la lame brillait comme le jour. Elle donna un coup si violent qu’il transperça la dure couche écailleuse. La hache s’enfonça entièrement dans la blessure. Sopale tourna son arme avant de la retirer brusquement pour agrandir la plaie. Jamais la salamandre n’avait autant souffert. Son regard noir se posa sur la démone qui battait déjà en retraite. Elle voulut partit à sa poursuite mais une autre boule de mana la frappa en pleine tête. J’aperçus enfin le tireur. C’était Occir. Il maniait sa fronde avec dextérité.
La salamandre saignait. Quelques gouttes de sang atteignirent mon bâton. Je les essuyai avec ma main quand ma bague entra en contact avec le liquide. Je ressentis une vive douleur dans tout le corps, puis mon doigt se tendit vers la salamandre. Un halo rose l’enveloppa. Le monstre s’arrêta, regarda autour de lui puis partit. La douleur s’estompa, ma bague redevint inerte. Je m’évanoui. J’avais épuisé tout mon mana.